A l’âge de 21 ans, Francis Petrel a été interné dans un hôpital psychiatrique, après avoir menacé physiquement sa famille au cours d’une crise d’hystérie sans doute inspirée par les voix qu’il entend depuis sa naissance.
L’hôpital « Western State » est un établissement à l’ancienne, avec des dortoirs de plusieurs dizaines de lits qui ne laissent aucune place à l’intimité, et dans lequel chaque malade doit supporter les névroses et psychoses de ses congénères en plus des siennes propres. C’est dans ce contexte angoissant que Francis, très vite rebaptisé C-Bird, a rencontré Peter le Pompier – ancien pompier pyromane – Napoléon et Cléo, qui se prennent respectivement pour l’empereur français et la reine d’Egypte Cléopatre, les aides-soignants Big Black et Little Black, et quelques médecins qui ne semblaient pas beaucoup plus « nets » que certains de leurs patients.
Et c’est dans ce contexte déjà très trouble qu’un meurtre particulièrement horrible a été commis, sur une élève infirmière. Un des patients, surnommé l’Efflanqué, a immédiatement été reconnu coupable et arrêté. Mais l’intervention d’une jeune adjointe du procureur de l’Etat, Lucy Jones, a relancé l’enquête : peu convaincue par la culpabilité de l’Efflanqué, elle a tout repris a zéro avec l’aide, entre autres, de Francis et Peter le Pompier. Cette collaboration improbable a donné lieu à des événements qui ont marqué en profondeur chacun des protagonistes – « fou » ou « sain d’esprit »…
Vingt ans après, Francis vit seul dans un appartement, libre. Officiellement, du moins : en fait, il est étroitement surveillé par les services sociaux, et contraint de prendre quotidiennement une quantité impressionnante de médicaments. Mais il n’entend plus de voix, et il semble dans l’ensemble aller beaucoup mieux. Pourtant, une courte visite à l’hôpital « Western State », fermé depuis plusieurs années, va réveiller des démons qu’il croyait soigneusement enfouis…
Ce roman de John Katzenbach n’est pas le premier qui ait pour cadre un hôpital psychiatrique, loin de là : tout le monde a lu ou vu, entre autres, »Vol au-dessus d’un nid de coucous », peut-être l’oeuvre la plus célèbre sur ce thème délicat. Mais l’originalité d’ »Une histoire de fous » réside dans le fait qu’elle est racontée par un « fou » parfaitement conscient de son état, mais doté d’une intelligence et d’un sens de l’observation qui lui seront bien utiles au cours de l’enquête qu’il va mener avec des gens « normaux ». Tout au long du roman, il y aura un aller-retour constant entre les agissements finalement assez sains du narrateur, et sa lutte intérieure pour ne pas sombrer dans une folie totale, malgré les agressions de toutes sortes dont il est victime. De même, on assistera à un aller-retour entre le Francis de 21 ans qui vit ces événements « en direct » et le quadragénaire dont le quotidien semble bien calme en comparaison. Mais les souvenirs sont vivaces, et comportent peut-être plus de dangers pour sa santé que ceux, beaucoup plus concrets, contre lesquels il a lutté vingt ans auparavant…
Bizarrement, « Une histoire de fous » est à la fois palpitant et… un peu ennuyeux. Palpitant, grâce à l’histoire elle-même, mélange de roman à énigme et de thriller, avec bien sûr une composante psychologique très marquée. Le principe de la narration sur deux époques distantes de vingt ans crée des ruptures dans le récit qui aident le lecteur à rebondir d’un chapitre à l’autre. Mais le roman traîne en longueur : les 750 pages ne se justifient pas. La lenteur du récit est souvent décourageante, mais on continue parce qu’on a envie de savoir le fin mot de l’histoire ; d’autant que l’auteur, en bon page-turner, sait « scotcher » son lecteur. Mais il ne peut l’empêcher de s’impatienter, et à juste titre quand, arrivé à la fin, celui-ci constate que le roman pourrait aisément être réduit de moitié sans que l’histoire n’en patisse – bien au contraire.
Un bon roman donc, qu’on ne regrette pas d’avoir lu. Mais du même auteur, on préfèrera L’analyste, tout aussi long mais beaucoup plus dense, qui ne donne pas cette impression d’étirement un peu artificiel. Et on attendra avec impatience de lire Faux coupable, le dernier opus de John Katzenbach !
Titeplume
23 juin, 2008 à 21:24
Voilà qui m’interpelle et qui me donne autant envie de le lire, tout comme l’homme programmé… merci à toi !
Super, c’est exactement ce qu’on souhaite quand on entreprend ce genre de présentation ! (enfin, pour les livres qu’on a appréciés…)
Brize
24 juin, 2008 à 13:52
J’avais bien aimé « L’analyste », mais je trouvais néanmoins qu’il y avait une bonne centaine de pages en trop. Il semblerait que pour « Une histoire de fous » l’auteur ait à nouveau été un peu trop prolixe !